APOCALYPSE la 2ème Guerre Mondiale
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Musicien, ingénieur du son et sound designer, Gilbert Courtois est aussi un
passionné d’aéronautique.
Mêlant ces deux passions, il enregistre depuis vingt-cinq ans des sons d’avions
de collection. Il était tout désigné pour sonoriser "Apocalypse". Rencontre.
Daniel Costelle vous présente comme un collectionneur de sons…
En effet. En parallèle de mon activité professionnelle de sound designer,
je nourris depuis toujours une passion pour les avions. Dans les années 1980,
j’ai eu la chance et le privilège d’intégrer l’Amicale Jean-Baptiste Salis
qui organise, chaque année, le fameux meeting aérien de l’aérodrome de la
Ferté-Alais.
On y voit des avions de collection de toutes sortes, notamment ceux qui ont
servi pendant la Seconde Guerre mondiale, des Messerschimtt, des Corsair ou
encore des Spitfire. Chacun a sa propre signature sonore…
Moi, patiemment, j’enregistre, je répertorie, je collectionne, j’immortalise
ces sons. On imagine qu’une série comme Apocalypse, c’est du sur-mesure pour
vous… Un rêve, oui ! Cette série fera date, indéniablement. La précision historique,
la rigueur technique et l’ampleur même du projet en font un événement sans
précédent. On en reparlera encore pendant vingt ans, c’est sûr. Personnellement,
c’est un honneur de travailler ainsi avec Daniel Costelle et Isabelle Clarke.
Ils placent la barre tellement haut ! Cela fait longtemps que leurs films
m’ont transmis le virus des archives. On ne peut pas tricher avec de tels
documents, on se doit de les respecter. Notamment et surtout en ce qui concerne
le son. Ne pas trahir les archives : c’est un devoir pour moi.
Comment procède-t-on, justement, pour sonoriser ces archives ? La plupart
de ces documents n’ont aucun son associé. Par rapport aux caméras (plutôt
légères pour l’époque), la prise de son nécessitait alors des moyens considérables,
avec des régies très encombrantes. Seuls certains discours officiels ont ainsi
pu être enregistrés.
Et nous n’avons aucune information sonore des combats filmés, ou alors il
s’agit de reconstitutions orchestrées à des fins de propagande. Inutilisables.
Mon travail consiste alors à revenir au son d’origine. J’analyse précisément
chaque image pour en identifier les éléments sonores. Ensuite, soit je les
retrouve (notamment dans mes propres collections sonores), soit je les reconstitue
à partir des connaissances historiques actuelles.
J’ai ainsi passé plus de six mois à me documenter sur les différents types
de mitrailleuses, sur leur cadence de tirs, etc. Autre exemple : nous savons
que les avions russes Lavoshkin 7, qui ont déboulé sur Stalingrad, avaient
exactement les mêmes moteurs que les bombardiers Yakovlev 2. Or, j’ai eu la
chance d’enregistrer ces modèles à la Ferté-Alais dans des conditions atmosphériques
similaires, en plein hiver. Reste alors à ajuster mes prises sonores aux images
existantes et, là, la magie opère.
Vous le voyez : aucune trahison. Les sons que l’on entend dans Apocalypse
sont authentiques ! Tout ce travail propulse véritablement le spectateur au
coeur de la bataille. Comment considérez-vous votre approche ? Mon rôle est
celui d’un traducteur. J’ai assisté à de nombreuses démonstrations militaires
qui m’ont marqué et que je m’efforce de “raconter” avec le son.
Un char Leclerc qui arrive au loin, c’est un véritable tremblement de terre.
Un avion qui passe au-dessus de votre tête en créant un vortex, ça vous chamboule
tout l’intérieur. Et une bombe qui explose, même à 1,5 km de distance, ça
vous sonne comme un coup de Mike Tyson. Alors je pense à ceux qui étaient
au milieu du champ de bataille… quelle violence !
Quel enfer ! La sonorisation des images d’archives permet une approche physique
du conflit. En accordant les sons, en travaillant sur leur spatialisation
(grâce au 5.1), on transmet un peu de cette sensation…
Quelles principales difficultés avez-vous rencontrées ? Etonnamment, le plus difficile n’a pas été de reconstituer le son des chars, des mitrailleuses ou des avions, mais certaines scènes de vie, comme lorsqu’un soldat allemand fait du patin sur un lac gelé à proximité de Stalingrad. J’ai aussi passé une partie de mes week-ends à “refaire” certains bruits de pas, comme ceux de Roosevelt, de Churchill ou de Gaulle...
http://programmes.france2.fr/apocalypse-seconde-guerre-mondiale/Raconter-avec-le-son